Les habitudes de consommation de la génération Z redéfinissent les codes du luxe… Les marques doivent en tenir compte.

- La génération Z réduit ses dépenses quotidiennes pour financer des pièces de luxe emblématiques, porteuses d'une forte valeur émotionnelle et sociale.
- La visibilité prime désormais sur la propriété. Si un produit ne fait pas le buzz en ligne, il n'est pas considéré comme un produit de luxe.
- Le secteur du luxe en Australie est déjà en pleine mutation, les jeunes consommateurs, soucieux de contenu, redéfinissant la notion de valeur.
De nos jours, impossible d'ouvrir son fil d'actualité sans voir une nouvelle marque de luxe prétendre faire face à des « vents contraires turbulents », des « vents contraires macroéconomiques » ou quel que soit le terme à la mode cette semaine.
Et pourtant, le marché du luxe continue de vendre. Pas au rythme effréné des années de pandémie où l'on voyait sans doute les PDG milliardaires à court de champagne pour fêter un nouveau trimestre record. Mais les ventes persistent.

Les prévisions de Bain pour la mi-année annoncent que 2025 sera l'année la plus instable depuis plus de dix ans, avec une légère contraction des biens de luxe personnels et des dépenses qui se déplacent selon les régions plutôt que de s'effondrer complètement.
La stratégie à long terme reste prometteuse ; les acteurs du marché semblent privilégier la valeur intrinsèque de leurs collections de niche plutôt que de réagir à un marché imprévisible qui pourrait faire disparaître leurs investissements plus vite qu'une story Instagram.
Même LVMH, après des mois de difficultés, a rebondi, ajoutant 29 milliards de dollars à la fortune de Bernard Arnault du jour au lendemain . Mais derrière ces gros titres se cache une histoire plus discrète, et bien plus perturbatrice : la génération Z change la donne, et les marques doivent s’adapter à ce nouveau rythme.

Je tiens à préciser d'emblée qu'il ne s'agit pas de clients traditionnels dépensiers ni de professionnels en milieu de carrière cherchant à acquérir une Rolex GMT-Master II pour accompagner leur propriétaire.
Cette génération, née avec le numérique et très influençable, redéfinit le luxe : sa nature, sa consommation, son appréciation et son partage. Certains experts affirment que la génération Z ne dépense plus. Le luxe serait mort. Point final. Pourtant, les chiffres dressent un tableau légèrement différent.
Cette génération, sans pour autant se rebeller ouvertement contre l'opulence, se montre assurément plus pragmatique dans son approche du luxe sur le nouveau marché.
Les petites choses superflues, comme les toasts à l'avocat, un nouvel abonnement à un service de streaming ou un deuxième café, sont passées de mode et remplacées par des déjeuners préparés à l'avance, des abonnements réduits et une tasse de thé au bureau. Cela permet à la génération Z, plus avisée, de faire des achats plus significatifs, fondés sur des recherches et des choix de goût éclairés, et apparemment à l'abri des tendances.

Ce sac Coach à 1 000 $, ces baskets en édition limitée et cette montre Cartier, filmés en mode portrait avec un éclairage impeccable, sont autant de symboles de richesse numérique, faits pour être exhibés. Un contraste saisissant avec les habitudes des générations précédentes, où la subtilité et le « luxe discret » suffisaient à révéler le statut social de celui ou celle qui les porte.
Pourtant, pour la génération Z, posséder un objet de luxe n'a aucune signification s'il ne peut pas exister en ligne. Un sac peut contenir vos clés et un briquet, mais pas avant d'avoir passé une heure au salon de coiffure et de maquillage, prêt pour ses 15 minutes de gloire sur TikTok, où il est filmé, retouché, filtré, mis en boucle, partagé et liké.
L'appareil photo a remplacé la vitrine, et les marques qui continuent de concevoir leurs produits pour la boutique plutôt que pour l'écran sont à la traîne.

Bien sûr, des décennies (voire des siècles) de savoir-faire sont impressionnantes, mais ce qui compte vraiment, c'est la crédibilité auprès des algorithmes. Une courte vidéo réalisée par un créateur talentueux peut générer plus de revenus qu'une campagne d'affichage à six chiffres. La génération Z achète parce qu'elle l'a vue, pas parce qu'on lui en a parlé.
Une nouvelle étude de TikTok révèle que la plateforme est devenue l'un des canaux à la croissance la plus rapide pour la découverte, la prise de décision et même l'achat direct de produits de luxe, deux tiers des primo-acheteurs de produits de luxe citant désormais les réseaux sociaux comme point d'entrée.
Cela ne veut pas dire que le jeune acheteur de luxe s'habille de la tête aux pieds en Hermès et Prada. Le plus souvent, sa pièce phare est associée à des pulls Ralph Lauren chinés ou à des basiques Uniqlo. Il recherche toujours le prestige, mais avec efficacité. C'est aussi simple que cela.

En Australie, ces changements sont déjà visibles dans les rues des villes, avec une hausse du tourisme international, notamment de la part des jeunes voyageurs chinois qui mêlent création et consommation de contenu.
Les boutiques de Sydney et de Melbourne voient le retour des consommateurs de la génération Z, très déterminés, qui savent exactement ce qu'ils veulent filmer et à quoi ils veulent que le montage final ressemble avant même d'avoir franchi le seuil de la rue commerçante.
Dans ce contexte, les mesures douanières de Trump et la reprise plus lente de la Chine apportent un éclairage, mais semblent quelque peu déconnectées de la tendance générale. La génération Z ne recherche plus sur Internet l'histoire d'une marque traditionnelle qui a peut-être perdu de son influence culturelle. Cette jeune génération de consommateurs attend de la valeur de ses marques et la validation de ses abonnés. Si le marché ne s'adapte pas à cette réalité, la prochaine génération du luxe passera à autre chose.
dmarge



