Transports Canada réduit sa surveillance de l'Arctique à un niveau de disponibilité cet été, selon des documents

Transports Canada a réduit cette année sa surveillance estivale de l'Arctique pour des raisons de pollution, de protection des baleines en voie de disparition et de sécurité maritime, a appris CBC News.
La décision de limiter les survols intervient à un moment où l'attention politique et sécuritaire nationale est accrue sur la région et cinq ans après que le ministère a promis de déployer un drone pour une vigilance accrue.
Une série de documents et de sources divulgués montrent que de hauts responsables du ministère ont décidé au printemps, au moment des élections fédérales, que le Programme national de surveillance aérienne (NASP) adopterait une « posture réactive » à l'égard de la région.
« Nous n'aurons aucune présence dans l'Arctique cet été, à moins qu'il soit nécessaire de déployer des forces », a écrit le directeur général par intérim des services aériens du ministère au printemps dans une note obtenue par CBC News.
Un porte-parole du ministère a confirmé à CBC News que des avions seraient dépêchés dans le Grand Nord « en cas de nécessité opérationnelle ». Autrement dit, uniquement en cas d'urgence.
« La NASP demeure prête à intervenir en cas d'incident », a déclaré Hicham Ayoun, porte-parole de Transports Canada, dans un communiqué envoyé par courriel.
Les documents suggèrent que la décision d'adopter une posture réactive est liée aux restrictions imposées aux heures supplémentaires des pilotes, à un retard dans l'acquisition d'un programme de drones prévu de longue date et à la panne d'un ancien avion à turbopropulseur Dash 7.
Ayoun a confirmé les restrictions sur les heures supplémentaires, mais a nié qu'elles affectaient le programme de surveillance.
« L'annulation des heures supplémentaires prévues par la direction pour le programme n'affecte pas la capacité du NASP à desservir l'Arctique », a-t-il déclaré dans une réponse écrite. « Les heures supplémentaires sont toujours autorisées en cas de besoin, par exemple en cas d'urgence. »

Transports Canada devait acheter un drone Hermes 900 Starliner de fabrication israélienne pour la surveillance de l'Arctique auprès d'Elbit Systems Ltd. Ce contrat a été attribué en décembre 2020 et la livraison est prévue en 2022.
Des pressions publiques ont été exercées, notamment par des groupes pro-palestiniens, pour annuler l'achat. Cette campagne a débuté avant le 7 octobre 2023, date à laquelle Israël a déclaré la guerre ouverte contre le Hamas à Gaza, suite aux attaques menées par le groupe militant dans le sud d'Israël.
Transports Canada a confirmé vendredi que le contrat demeure actif, mais n'a pas expliqué pourquoi le programme a été retardé.

Le De Havilland Canada DHC-7, un avion des années 1970 connu sous le nom de Dash 7, effectuait des patrouilles annuelles depuis 20 ans, de juin à novembre. Il était stationné à Iqaluit, capitale du Nunavut, durant ces mois.
En 2023, le gouvernement fédéral a construit un hangar dans la communauté du Nord pour accueillir les avions du NASP. Ce hangar a été récemment achevé avant la saison de vol 2025.
Cependant, l'avion ne pouvait plus être exploité en toute sécurité, car l'instrument de cap magnétique était hors service, selon les documents. Un débat a eu lieu au printemps dernier sur la rentabilité de la réparation de l'avion.
L'Arctique au centre des préoccupations géopolitiquesOutre l'ancien Dash 7, la NASP possède deux avions de patrouille turbopropulseurs Dash 8 plus récents, mais un seul d'entre eux était équipé d'un kit de gravier spécial nécessaire pour atterrir sur les pistes courtes du Nord. Transports Canada prévoit acquérir un troisième Dash 8, mais n'a pas précisé si cet appareil supplémentaire permettra une reprise complète du service dans le Grand Nord.
La décision de mener une surveillance selon les besoins intervient à un moment où l’Arctique est au centre des préoccupations géopolitiques – de nombreux rapports et évaluations avertissant que la Chine et la Russie sont de plus en plus actives dans la région.
De plus, les canaux autrefois encombrés par la glace deviennent plus navigables en été, selon un rapport publié en décembre 2024 par l’ Observatoire sur la politique et la sécurité dans l’Arctique .
L'étude a révélé que 466 voyages de navires ont été effectués dans les eaux arctiques canadiennes en 2024, soit une augmentation substantielle par rapport aux années précédentes. Par ailleurs, les données du Conseil de l'Arctique indiquent que le nombre de navires entrant dans la région a augmenté de 37 % entre 2013 et 2023.

Des navires de recherche chinois sont apparus plus souvent le long des côtes arctiques américaines. Des avions militaires et des navires des garde-côtes canadiens ont participé à la surveillance de ces navires chinois au large de l'Alaska.
« Il s'agit d'une personne qui sous-estime Transports Canada, même si cette entreprise contribue de manière très significative à la mission de souveraineté et de sécurité nationales », a déclaré Michael Byers, professeur de sciences politiques à l'Université de la Colombie-Britannique et expert en souveraineté et en géopolitique de l'Arctique.
Il y a plus de trafic maritime, a-t-il dit, et il est confronté à des risques croissants, et non décroissants.
Byers a déclaré que l'éloignement de l'Arctique est tentant pour certains capitaines de navires qui croient pouvoir rejeter du carburant usagé parce qu'ils sont hors de vue et hors de l'esprit.
Notant l'importance politique accordée à l'Extrême-Nord ces dernières années, il a déclaré qu'il était « surpris » qu'une décision ait été prise de réduire les vols de surveillance.
« L'accent a clairement été mis sur la surveillance et la sécurité de l'Arctique sous le nouveau gouvernement Carney, et ces vols de Transports Canada sont très peu coûteux comparativement aux mesures de surveillance et de sécurité que [le ministère de la Défense nationale] prévoit mettre en place. C'est vraiment peu coûteux. »
cbc.ca