« Un recul inédit » : la Fondation des femmes alerte sur la baisse des subventions allouées aux associations féministes

« Les coupes budgétaires tuent », dénonce Laura Slimani, cheffe du pôle projet à la Fondation des femmes. La structure de collecte de dons en faveur de l’égalité et contre les violences faites aux femmes a, mercredi 27 août, lancé l’alerte. Dans son enquête menée au cours de l’été 2025 auprès de 148 associations, 71 % d’entre elles déclarent à la Fondation que « leur santé financière est dégradée ». Une situation due, selon 52 % de ces structures, à une baisse ou à un non-renouvellement des subventions. « Nous vivons un recul inédit des subventions accordées aux associations féministes », dénonce Laura Slimani.
La baisse des subventions contraint les associations à limiter le nombre de femmes accueillies et accompagnées ou les services d’écoute et d’accompagnement proposés, laissant un nombre dramatique de femmes en danger face à des portes fermées, faute de moyens pour les aider.
Au sein même des associations, les coupes budgétaires produisent également une violence institutionnelle envers les travailleuses et travailleurs sociaux en proie à des suppressions de poste, des retards de salaires et des conditions de travail dégradées. « Derrière ces chiffres ce sont des professionnels en burnout, en arrêt maladie, signale Mine Günbay, directrice du numéro 39 19, tous les jours des directrices de centres nous appellent en disant qu’elles ne peuvent plus ».
La directrice générale des Centres d’information sur les droits des femmes et des familles, (CIDFF), Clémence Pajot, illustre cette situation par divers exemples à travers tout l’hexagone : « Nous estimons à une cinquantaine de licenciements ou suppressions de postes à l’échelle de notre réseau pour éviter la cessation de paiements. Le CIDFF de la Vienne a appris au mois de juin qu’il ne toucherait plus de subvention du ministère de la Justice cette année. Dans l’Ardèche, 13 salariés ont été licenciés ces derniers mois. En Bretagne, 15 emplois ont été supprimés. Et par conséquent, une permanence aussi. »
« Nous passons du temps à nous préoccuper et chercher des solutions administratives et financières, plus qu’à répondre à nos missions », déplore dans l’enquête Aurore Penin, directrice du CIDFF des Deux-Sèvres. Mission confiée par ailleurs par l’État.
Selon l’enquête, l’origine de ces coupes budgétaires provient à 38 % des conseils départementaux, à 31 % des communes, 26 % du ministère des droits des femmes, « pourtant censé être le chef de file de la lutte contre les violences », pointe la Fondation, et à 25 % des conseils régionaux et intercommunalités.
Comment expliquer cette baisse, notamment de la part du ministère des droits des femmes, pour qui le budget est resté stable en 2025 ? La Fondation émet l’hypothèse que sur les 5 dernières années, devant l’augmentation des besoins d’accompagnement des femmes victimes de violence, l’État a multiplié les projets et nouvelles structures. « C’est du saupoudrage », résume Laura Slimani, « cela se traduit par une augmentation à tel endroit et une réduction à tel autre ».
De même, en 2023, l’État annonçait doter le programme 137 de lutte pour l’égalité hommes femme d’un budget de 85 millions d’euros en 2025. Mais consacré intégralement à « l’augmentation du financement de l’aide d’urgence aux victimes de violences conjugales, mais pas pour les associations », signale Laura Slimani.
Il ne faut pas non plus ignorer les choix politiques, comme celui fait par le conseil départemental de la Drôme, en votant la fermeture de sept centres de santé sexuelle gérés par le département et une baisse de 20 % de sa subvention au Planning Familial.
Dans un contexte de protubérance des discours réactionnaires et masculinistes, « nous avons toutes les raisons d’être inquiètes sur la capacité à poursuivre cette lutte », déplore la Fondation des femmes. Cette dernière entend également concentrer sa rentrée sur la coalition qu’elle forme, avec d’autres associations, pour une loi intégrale contre les violences sexuelles.
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