La logique du déficit budgétaire : les recettes du Trésor ont chuté de près de deux mille milliards, tandis que les dépenses restent les mêmes.

La Douma d'État a approuvé des amendements au budget fédéral 2025, portant le déficit à 5 700 milliards de roubles, soit 2,6 % du PIB. Les recettes diminueront de près de 2 000 milliards de roubles, pour atteindre 36 560 milliards de roubles, tandis que les dépenses resteront inchangées à environ 42 000 milliards. Il a été décidé de financer le déficit croissant par l'emprunt intérieur, laissant le Fonds national de prévoyance (FNP) inchangé.
Le ministère des Finances explique cette situation par la nécessité de préserver des réserves pour faire face aux imprévus, tout en continuant à remplir ses obligations sociales. Les économistes, cependant, ne sont pas d'accord : certains y voient une stratégie équilibrée, tandis que d'autres préviennent que l'augmentation des dettes et des taux d'intérêt élevés pourraient impacter les prêts, les prix et les entreprises.
La Douma d'État a approuvé les amendements au budget fédéral 2025 en deuxième et troisième lectures. Selon les nouveaux paramètres, les recettes du Trésor s'élèveront à 36 560 milliards de roubles, tandis que les dépenses atteindront 42 820 milliards. L'écart est de 5 740 milliards de roubles, soit 2,6 % du PIB. C'est près de deux mille milliards de roubles de plus que prévu. Bien qu'il ne s'agisse techniquement que d'une révision des chiffres, en réalité, le budget est devenu le plus déficitaire de ces dernières années.
Le ministère des Finances souligne que ces changements tiennent compte de la situation macroéconomique actuelle et des résultats de l'exécution budgétaire de janvier à août. Comme l'a expliqué le ministre des Finances Anton Siluanov, ces fonds serviront à honorer les obligations sociales, à répondre aux besoins de la défense et à atteindre les objectifs de développement national. Cela comprend le soutien aux prêts hypothécaires préférentiels, aux familles et aux régions, ainsi qu'aux projets d'infrastructures. Selon le ministre, il n'est pas prévu de réduire les projets nationaux ; au contraire, 140 milliards de roubles supplémentaires leur seront alloués.
Le gouvernement prévoit de financer le déficit croissant par l'emprunt intérieur. La dette publique augmentera de 2 000 milliards de roubles, atteignant 17,7 % du PIB. Cependant, il n'est pas prévu de recourir au Fonds national de prévoyance. Le ministère des Finances estime qu'il est imprudent de toucher aux réserves maintenant : elles devraient être conservées « pour les mauvais jours ».
Les experts indépendants ont toutefois des avis divergents sur la situation. Andreï Glouchkine, membre du Conseil de Delovaïa Rossiya (Russie des affaires), est convaincu qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter. Il affirme que la croissance du déficit à 5 700 milliards de roubles ne reflète pas des problèmes, mais plutôt une stratégie visant à soutenir l'économie et la stabilité sociale. « Certes, les recettes ont diminué de près de 2 000 milliards de roubles en raison de la baisse des revenus pétroliers et gaziers, mais ces fluctuations sont temporaires et liées à l'environnement extérieur », estime l'expert. « Lorsque les prix de l'énergie se redresseront et que les revenus hors pétrole et gaz augmenteront, la situation se stabilisera. »
Glushkin estime que l'emprunt intérieur est une mesure prudente : « L'État conserve des réserves pour faire face aux imprévus, et l'emprunt intérieur permet le développement du marché financier et renforce la confiance des investisseurs. » Il a ajouté que le niveau de la dette publique reste modéré, ce qui signifie qu'il n'y a aucun risque pour la stabilité économique.
Ivan Samoylenko, associé directeur de l'agence B&C, partage cet avis : « Le budget reflète les processus objectifs de l'économie, qui ralentit après une forte surchauffe. Les recettes sont stables, les dépenses augmentent, mais sans hausse excessive. Il ne s'agit pas d'une crise, mais d'une adaptation normale. » Il souligne que le gouvernement prend des « mesures réfléchies » en abandonnant le Fonds national de protection sociale : « Les réserves sont nécessaires pour les situations imprévues, et non pour les besoins actuels. »
Cependant, tous les experts ne sont pas aussi optimistes. Alexeï Kritchevski, analyste financier et auteur du projet « Économisme », voit dans le déficit croissant un signal d'alarme : « 5 700 milliards, c'est beaucoup. Pour l'économie, cela signifie que le gouvernement émettra davantage d'obligations, ce qui, à son tour, exercera une pression sur les taux d'intérêt et l'inflation. » Il a ajouté que les taux d'intérêt resteraient élevés et que les petites et moyennes entreprises seraient contraintes d'emprunter « à des taux très élevés ».
Krichevsky souligne que la baisse des recettes budgétaires n'est pas simplement due à des fluctuations financières temporaires, mais reflète des problèmes structurels. « Apparemment, les estimations de revenus pétroliers et gaziers étaient trop optimistes. De plus, les impôts augmentent et les petites entreprises sont incapables de supporter le fardeau fiscal », prévient l'analyste.
Selon lui, les conséquences du déficit affecteront également les citoyens ordinaires : « Les impôts ont déjà augmenté, et les entreprises en tiendront compte dans leurs prix. L’inflation sera supérieure aux estimations officielles, et il est peu probable que la Banque centrale baisse son taux directeur : le surendettement public est trop élevé. »
Pendant ce temps, les autorités assurent que toutes les obligations sociales seront respectées et que l'inflation restera maîtrisée. Le ministère des Finances souligne que le niveau actuel de la dette publique russe est l'un des plus bas du monde. Mais pour le citoyen moyen, les chiffres d'un déficit de plusieurs milliers de milliards de dollars ne sont pas de simples chiffres comptables abstraits. Il s'agit de savoir si les prêts immobiliers deviendront abordables, si les prix des magasins augmenteront et si les salaires suffiront à acheter les biens dont ils bénéficiaient autrefois.
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