Qu’est-ce que la Charte de l’environnement, ce texte qui a entraîné la censure de la loi Duplomb ?

« La Charte pour l’environnement ouvrira la voie à une véritable révolution, celle de l’écologie humaniste », avait déclaré Jacques Chirac en 2003, alors président de la République. Jeudi 7 août, c’est sur la base de ce texte que le Conseil constitutionnel a partiellement censuré la loi Duplomb.
La version de la loi qui sera promulguée par Emmanuel Macron ne comprendra donc pas les dispositions les plus controversées, celles qui prévoyaient de réintroduire l’acétamipride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes, surnommé « tueur d’abeilles » et interdit en France depuis 2018.
Pour justifier leur décision, les sages ont invoqué la Charte de l’environnement. Depuis 2005, ce texte fait partie du bloc de constitutionnalité, au même titre que la Constitution de 1958 et son préambule, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et le préambule de la Constitution de 1946. Toutes les normes juridiques, qu’il s’agisse de lois, de décrets et de règlements, doivent s’y conformer. Si ce n’est pas le cas, le Conseil constitutionnel peut les censurer.
Adoptée en 2004, la Charte comporte dix articles définissant les droits et devoirs liés à la protection de l’environnement. Elle répondait à une préoccupation croissante sur le climat, déjà présente depuis les années 1970, lorsque la première Conférence des Nations unies sur l’environnement, à Stockholm, avait placé la question au centre des débats internationaux. En France, des lois existaient déjà, comme celle sur la protection de la nature de 1976 et celle sur l’eau en 1992, mais aucune n’avait de valeur constitutionnelle.
L’enjeu devient pressant à la fin du XXe siècle, alors que l’Hexagone est marqué par des crises sanitaires et écologiques majeures : la vache folle, la marée noire de l’Erika provoquée par le naufrage du pétrolier au large de la Bretagne, ou encore les polémiques autour des OGM.
En réaction, Jacques Chirac, fraîchement réélu à la présidence en 2002, veut marquer son second mandat par une réforme écologique majeure et faire de l’environnement un pilier de la République. Il lance dans la foulée son projet de rédiger un texte, qui deviendra la Charte de l’environnement.
Elle affirme que la préservation de l’environnement est indispensable au développement durable et qu’elle suppose une solidarité entre générations présentes et futures. Elle introduit également trois principes fondamentaux : la prévention, qui consiste à refuser un projet lorsque ses effets néfastes sont connus ; le pollueur-payeur, qui impose à l’auteur d’une pollution d’en assumer les coûts ; et la précaution, qui vise à prendre des mesures de protection même si les risques sont incertains. Cette dernière disposition permet, par exemple, de suspendre la mise sur le marché d’un pesticide en attendant de vérifier ses dangers pour la santé humaine.
La Croıx