« A11pl3Z » : pourquoi ce troisième objet interstellaire fascine les astronomes

Un objet interstellaire a été détecté mardi 1er juillet dans la soirée, à la même distance de la Terre que Jupiter (600 millions de kilomètres !). La découverte a été faite à Hawaï par des astronomes de la Nasa appartenant au projet ATLAS de surveillance des astéroïdes. Nommé A11pl3Z, il devient le troisième objet de ce type observé par un être humain.
Sa vitesse, proche de 60 kilomètres par seconde, et sa trajectoire, indique que l’objet « n’est pas en orbite autour du Soleil, mais vient de l’espace interstellaire et va y retourner » selon le responsable de la défense planétaire de l’Agence spatiale européenne (ESA), Richard Moissl.
Il a été classifié comme comète par le Centre des planètes mineures de l’Union astronomique internationale. Cela s’explique par le fait qu’il ne s’agit pas d’un corps mort, comme c’est le cas des astéroïdes, mais bien d’un objet avec un noyau actif, composé en partie de glace. Mais sous bien des aspects, cette comète se distingue de celles que nous connaissons, qui provoquent notamment les pluies d’étoiles filantes en été, et dont l’une des plus célèbres est la comète de Halley.
L’une des différences majeures concerne son origine. Les comètes les plus connues proviennent des confins de notre système solaire. Au-delà de la ceinture de Kuiper, où se situe Pluton, elles se regroupent dans le nuage d’Oort. Cette région se situe à plus de 5 000 unités astronomiques (UA) de la Terre, soit 5 000 fois la distance Terre-Soleil (environ 150 millions de kilomètres). A11pl3Z provient d’encore plus loin, au-delà du nuage d’Oort, à plus de 100 000 UA.
Il ne s’agit pas non plus d’une comète extrasolaire, qui gravite autour d’une étoile, mais bien d’un corps situé entre deux systèmes. Ainsi plongée dans l’obscurité, la comète ne peut être visible que lorsqu’elle rentre dans notre système solaire. Cela explique que ce ne soit que le troisième objet de ce type à avoir été observé, après Oumuamua en 2017 et 2I/Borisov deux ans plus tard.
L’apparition de Oumuamua, qui signifie « messager » en hawaïen, avait fait naître plusieurs hypothèses sur son origine. Il était très long et aplati, environ 150 mètres de longueur pour 100 de large et 20 de profondeur, et ne possédait pas de poussière lumineuse, comme la plupart des comètes. Surtout, sa vitesse était beaucoup plus élevée, estimée à 87 kilomètres par seconde, et sa trajectoire s’était modifiée comme pour s’éloigner du Soleil.
Plusieurs scientifiques avaient alors sérieusement envisagé la piste du vaisseau extraterrestre. Des études postérieures ont prouvé qu’il s’agissait bien d’une comète interstellaire. Comment alors expliquer ces comportements étonnants ? La réponse réside dans la composition de l’objet.
Comme toute comète, Oumuamua possède un noyau composé de glace. Comme l’explique le média Futura-sciences, les rayons cosmiques produits par le Soleil convertissent les molécules d’eau, présentes dans la glace, en hydrogène. Ce gaz reste piégé dans la glace puis jaillit lorsque la comète se rapproche du Soleil. En se libérant, il produit une poussée qui accélère la vitesse de la comète et modifie ainsi son orbite.
A11pl3Z serait plus grand qu’Oumuamua, et probablement l’objet de ce type le plus volumineux jamais observé. La comète mesurerait entre 10 et 20 km de diamètre, mais pourrait être plus petite si elle est bien composée de glace, qui reflète davantage la lumière et donne ainsi une impression de grandeur. Jonathan McDowell, astronome au Centre d’astrophysique de Harvard-Smithsonian estime pour sa part « qu’il s’agit principalement de glace plutôt que de roche ».
Cette comète sera observable jusqu’à l’an prochain. Une aubaine pour les astronomes, qui auront donc plus de temps pour l’étudier. Des observations pourraient permettre de détecter des précurseurs de la vie, comme des acides aminés. Selon Mark Norris, astronome à l’université britannique de Central Lancashire, cela donnerait aux chercheurs « beaucoup plus confiance dans le fait que les conditions pour l’apparition de la vie existent dans d’autres systèmes stellaires ».
Le scientifique assure en outre que le nouvel observatoire Vera C. Rubin, situé au Chili, pourra bientôt découvrir des corps interstellaires tous les mois. Un moyen d’en apprendre davantage sur ces objets venus d’ailleurs, encore très méconnus.
La Croıx