99,999 % des fonds marins n’ont pas été observés directement par les humains

Selon une estimation d’océanographes, seuls 0,001 % des fonds océaniques auraient été observés par l’œil humain. Un chiffre extrêmement faible au regard des enjeux qu’ils représentent – notamment pour la potentielle exploitation de leurs ressources en minéraux.
On l’a beaucoup entendu et répété : les scientifiques ont engrangé bien plus de connaissances sur l’espace que sur les océans. Pourtant les planchers océaniques représentent 71 % de la surface totale de la Terre et environ 93 % d’entre eux sont de grands fonds, c’est-à-dire situés à une profondeur de plus de 200 mètres, rappelle New Scientist. “Si la majorité a été cartographiée grâce aux satellites et aux sonars embarqués sur des bateaux, une infime partie a été directement observée”, poursuit l’hebdomadaire britannique. Plus précisément, 99,999 % des fonds marins n’ont pas été observés directement par l’humain.
Seuls 2 130 km2, soit un dixième de la taille de la Belgique, ce qui représente moins de 0,001 % des fonds océaniques profonds, ont en effet été explorés, selon une nouvelle étude parue dans Science Advances. Pour parvenir à cette estimation, Katy Croff Bell et ses collègues d’Ocean Discovery League ont étudié les données recueillies lors de 43 681 plongées en mer profonde avec des submersibles habités ou robotisés. “Les observations visuelles sont essentielles pour l’étude des fonds marins”, explique Cosmos. Elles “apportent un contexte géographique aux échantillons qui y sont collectés, permettent d’observer les comportements et les interactions de la vie marine et de mener des études plus précises sur la biodiversité”, écrivent les auteurs.

Grâce à ce travail de recensement, les océanographes ont établi une carte des zones déjà explorées. Elle “montre que les plongées se sont concentrées à proximité de quelques pays, notamment des États-Unis, du Japon et de la Nouvelle-Zélande”, indique la revue Nature. Un biais majeur sur les connaissances, déjà très parcellaires, des fonds océaniques, comme l’explique Katy Croff Bell à New Scientist. Elle fait la comparaison avec les terres émergées :
“Si vous n’avez exploré que l’Amérique du Nord, le Japon et la Nouvelle-Zélande, comment pouvez-vous savoir ce que sont la savane en Afrique et la forêt en Asie du Sud-Est ?”
En outre, les chercheurs se sont aperçus que les plongées étaient de moins en moins profondes : celles à plus de 2 000 mètres représentaient 58,4 % des plongées dans les années 1960, contre 25,9 % dans les années 2010. Et ce alors que les trois quarts des fonds marins se situent entre 2 000 et 6 000 mètres de profondeur.
Pour la première autrice de l’étude, il est essentiel de lancer des campagnes d’observation des grands fonds. Car “l’exploration limitée d’une région aussi vaste devient un problème critique tant au niveau scientifique qu’au niveau réglementaire étant donné les menaces qui pèsent sur les grands fonds océaniques, et qui relèvent aussi bien du changement climatique que de la potentielle exploitation des ressources minières”, rapporte Cosmos.
Courrier International