Peine de prison, amende…Que risque François Bayrou s’il ment devant la commission d’enquête sur Bétharram ?

C’est toujours plus simple de dire la vérité. Surtout devant une commission d’enquête parlementaire. Notamment parce que le mensonge devant une telle instance constitue un délit pénal. François Bayrou, comme toute personne s’exprimant sous serment devant les députés, s’expose en effet à cinq années de prison et 75 000 euros d’amende en cas de parjure.
La parole du premier ministre, auditionné ce mercredi 14 mai dans le cadre de la commission d’enquête liée à l’affaire Bétharram, sera donc décortiquée au mot près. D’abord parce qu’un chef de gouvernement doit moralement la vérité à la représentation nationale, qui contrôle son action. Et surtout parce qu’un mensonge de plus devant des « parlementaires enquêteurs » réunis en commission constituerait tout simplement le viol de la loi.
Le maire de Pau devra donc se montrer précis et transparent. Et pour cause, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, « la constitution du délit de faux témoignage suppose l’affirmation d’un fait inexact, la négation d’un fait véritable ou une omission volontaire ». Cette règle n’est d’ailleurs pas propre à la Ve République et a été instituée dès 1914.
Pour autant, une seule personne a été condamnée pour faux témoignage. En 2018, le pneumologue Michel Aubier, chef de service à l’hôpital Bichat de Paris, avait répondu n’avoir « aucun lien d’intérêt avec les acteurs économiques » devant une commission d’enquête sur la pollution de l’air. Problème : Michel Aubier était également médecin-conseil de l’entreprise Total, pour une rémunération de 50 000 euros par an. Ce mensonge, transmis à la justice, lui a valu condamnation.
Cet exemple, s’il dissuade de mentir, n’empêche pas tous les parjures. Notamment parce que les parlementaires, parfois, renoncent à saisir le parquet. En 2012, Frédéric Oudéa, alors président de la Société générale, avait affirmé devant les sénateurs enquêtant sur l’évasion fiscale que sa banque n’avait plus rien à voir avec les paradis fiscaux. Un mensonge mis en lumière par le scandale des Panama Papers.
Le rapporteur de la commission, le communiste Éric Bocquet, s’était alors activé pour transmettre les éléments à la justice, ce que le bureau du Sénat avait refusé. En 2023, le Sénat a toutefois signalé les propos de Karim Tadjeddine. Le directeur associé de McKinsey France avait affirmé, sous serment, devant la commission d’enquête sur les cabinets de conseil que l’entreprise payait l’impôt sur les sociétés en France, alors qu’elle n’avait rien payé au fisc en dix ans. Finalement, l’infraction a été jugée insuffisamment caractérisée.
D’autres affaires sont en cours. Y compris contre des membres du gouvernement. En janvier 2025, une information judiciaire a été ouverte contre Aurore Bergé, qui, en tant que ministre des Familles, avait récusé tout lien personnel avec Elsa Henry, déléguée générale de la Fédération française des entreprises de crèches, lors de son audition sur le modèle économique de ces établissements.
Par ailleurs, la justice a estimé ce mardi que l’ancien secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler n’avait pas commis d’infraction en refusant de se présenter devant la commission d’enquête sur le dérapage budgétaire, alors qu’un refus peut être puni par la loi. Ce mercredi, le milliardaire Bernard Arnault pourrait d’ailleurs ignorer la convocation du Sénat au sujet des aides publiques aux entreprises. Une autre lui serait alors envoyée, avant possible transmission à la justice…
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