« Ni Bolloré, ni précarité » : les salariés du « Parisien » poursuivent leur combat

Le message est aussi clair que frontal : les salariés du Parisien refusent à la fois la perspective d’un rachat par l’empire Bolloré et la dégradation de leurs conditions de travail. Sur le parvis du siège du journal, ce lundi 22 septembre, ils se sont d’abord rassemblés avec pancartes et banderole à la main : « Ni Bolloré, ni précarité ».
L’accès aux journalistes extérieurs était interdit. Même un employé du Parisien se voit refuser l’entrée malgré sa carte de presse : il avait oublié son badge d’accès. Ambiance tendue… La mobilisation s’est ensuite poursuivie à l’intérieur, pour la troisième assemblée générale de la rédaction depuis la rentrée.
L’inquiétude a resurgi lorsque Challenges a évoqué un possible intérêt du milliardaire Vincent Bolloré pour le titre détenu par l’autre milliardaire Bernard Arnault. Mais aucun communiqué officiel n’est venu clarifier la situation, ce qui a alimenté les craintes en interne. « On est dans le silence radio total », explique Aymeric Renou, délégué syndical SNJ. « La confiance avec la direction, qui n’a pas tenu ses engagements, est rompue. Avec 30 millions de pertes en 2024, le journal s’enfonce dans une crise financière et devient une cible pour Bolloré. Il ne nous reste plus qu’à alerter l’opinion publique. »
Le malaise se fait sentir dans la rédaction. « J’ai une collègue qui m’a dit qu’elle avait pris un demi-Lexomil pour venir travailler, confie-t-il. Le climat est délétère, je n’ai jamais connu une rentrée aussi difficile. » Derrière la revendication sociale se profile aussi l’inquiétude de voir le Parisien, journal populaire d’information locale et nationale, devenir un journal au service de l’extrême droite. « Ce n’est pas un journal d’opinion, le voir transformé en organe de propagande, c’est non », insiste Aymeric Renou.
Laure Parny, rédactrice à l’édition Val-de-Marne et représentante du personnel depuis plus de vingt ans, partage ce constat. Pour elle, le problème dépasse largement la seule rumeur Bolloré. « L’une des forces du Parisien, c’est sa couverture francilienne. Avec les suppressions de poste et les départs non remplacés, on n’a plus les moyens de faire notre travail de localier. Les municipales approchent et, dans mon département, il manque déjà plusieurs rédacteurs. » Une situation qui, dit-elle, compromet directement le rôle d’information du titre. « C’est tout simple : on n’est plus en capacité d’informer correctement. »
Si l’hypothèse d’un rachat par Bolloré venait à se concrétiser, Laure Parny, pancarte à la main, n’imagine pas rester. « Ça fait vingt-quatre ans que je travaille au Parisien. C’est le journal de mon adolescence. Mais si Bolloré le rachète, ce sera définitif pour moi. Je claquerai la porte. » Ce double combat, pour l’emploi et contre la précarité, résonne d’autant plus fortement que Bernard Arnault, propriétaire actuel, garde le silence. « Il n’a pas acheté une entreprise de vêtements. Il a acheté un média qui a du sens. On a besoin qu’il réaffirme son attachement au Parisien et qu’il nous donne les moyens de travailler », souligne la représentante du personnel.
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L'Humanité