Juliette Binoche réagit à la condamnation de Gérard Depardieu
Depardieu, guerre israélo-palestinienne, rôle du cinéma face aux fake news... Lors de la conférence de presse du jury du 78e Festival de Cannes le 13 mai, le jury a passé un grand oral.
Depardieu, Gaza, Trump, Bardot, les nouvelles règles vestimentaires (l’interdiction de porter des robes transparentes ou trop décolletées sur le tapis rouge) et même James Bond (présence de Halle Berry oblige). La conférence de presse du jury du 78e Festival de Cannes, mardi après-midi dans une salle pleine à craquer du Palais, a dépassé la simple évocation du plus prestigieux festival de cinéma du monde et de la sélection des films. La présidente, Juliette Binoche, entourée des membres du jury (Jeremy Strong, Payal Kapadia, Leïla Slimani, Hong Sang Soo, Halle Berry, Alba Rohrwacher, Carlos Reygadas, Dieudo Hamadi), a passé un grand oral délicat.
La première question a porté sur Gérard Depardieu, tout juste condamné à 18 mois de prison avec sursis pour agression sexuelle. Binoche a acquiescé d’un simple « Absolument » au constat que cette décision était le fruit du mouvement Metoo. Réinterrogée quelques minutes plus tard sur la signification de la condamnation d’un « monstre sacré », elle a développé sa pensée. « Déjà l’association de monstre et sacré m’a toujours gênée, a expliqué l’actrice. Ce n’est pas un monstre, c’est un homme, qui a été désacralisé, apparemment, pour des faits passés sous la justice. Une star de cinéma est un homme, un roi est un homme, un président est un homme. Le sacré advient quand on crée, on joue, on met en scène. Il ne nous appartient pas. Quand il est désacralisé comme il l’est en ce moment, ça fait réfléchir sur le pouvoir qu’ont certaines personnes. »
Interrogée sur le fait qu’elle n’avait pas signé la tribune parue dans Libération dénonçant la situation à Gaza, Juliette Binoche a indiqué : « Vous comprendrez peut-être pourquoi plus tard, je ne peux pas vous répondre maintenant. » Sur les désordres du monde, Leïla Slimani a été plus diserte. « Le rôle de ce festival est de mettre en avant des artistes, a déclaré la journaliste et écrivaine franco marocaine. De mettre en avant des récits, des personnages, de ce que la vie humaine a de plus horrible mais aussi de plus beau. Donc de raconter ces contradictions. La vie humaine est faite de monstruosité mais elle continue, malgré tout. On se lève, on s’habille, on éduque nos enfants, on fait des films. Quand une partie du monde est dans le noir, nous devons continuer à défendre la beauté, la poésie et l’envie de vivre. »
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Jeremy Strong, l’acteur de Succession et de The Apprentice, a lui été interpellé sur ce film sur l’ascension du jeune Donald Trump au début des années 1980, en compétition à Cannes en 2024 – il joue l’avocat Roy Cohn, mentor méphistophélique du futur président des États-Unis. « Je ne pouvais pas accompagner le film à Cannes l’année dernière parce que je jouais au théâtre à ce moment-là. Je vois Roy Cohn comme le créateur des fake news, des faits alternatifs. Ce que je voudrais faire cette année en tant que membre du jury est donc à l’opposé de la démarche du Roy Cohn que j’interprétais l’an passé. »
Quant à savoir si Cannes, c’était mieux avant, selon B.B., grave question. « I feel the same « engouement », as we say in french », a répondu en anglais Juliette Binoche. Halle Berry a tout de même regretté de ne pas pouvoir porter ce soir son « amazing » robe sur le tapis rouge, à cause de la longueur de sa traîne.
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