A Strasbourg, l’érotique opéra « Giuditta » de Pierre-André Weitz

Le langoureux Meine Lippen, sie küssen so heiss – Sur mes lèvres se brûle ton cœur – a imprimé dans la tête des auditeurs de ce dimanche 11 mai les volutes valsées du plus célèbre air de la Giuditta de Franz Lehar (1870-1948). Présentée dans sa traduction française au Théâtre national du Rhin, à Strasbourg, l’œuvre oscille entre opérette, opéra et musique de film. Rien d’étonnant, son synopsis est en partie inspiré par Morocco (Cœurs brûlés), un film réalisé en 1930 par Josef von Sternberg d’après le livre de Benno Vigny, Amy Jolly, la femme de Marrakech (publié en Allemagne en 1927). Ce premier grand rôle hollywoodien de Marlene Dietrich met en scène une artiste de cabaret échouée à Mogador en pleine guerre du Rif, femme fatale éprise d’un beau légionnaire (Gary Cooper). Son charme envoûte toute la gent masculine, dont un richissime homme d’affaires.
Le 20 janvier 1934, captée en direct à l’Opéra de Vienne par 120 radios du monde entier, et jouée à guichets fermés, la « musikalische Komödie » du compositeur de La Veuve joyeuse remporte un franc succès. Adaptée en version française par André Mauprey (déjà « traducteur » du Pays du sourire), la dernière œuvre scénique de Franz Lehar conquiert les villes d’Europe, avant que son essor ne se voit enrayé par l’avènement du nazisme – Lehar, qui a épousé une femme de confession juive, travaille aussi avec des artistes de confession hébraïque, à commencer par le célèbre ténor, Richard Tauber, bientôt exilé en Grande-Bretagne, qui lui a inspiré les airs confiés au personnage d’Octavio, dont la belle brisera le cœur sans retour.
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Le Monde